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Dom Alexis, le chant des pierres
3 mai 2013

DEUXIÈME VOLET DU TEXTE INÉDIT DE DOM ALEXIS

C’était en octobre de cette même année 1936 que je vins à Boquen. Dès 1934, j’avais formé une société civile qui avait acquis les ruines de l’abbaye et le domaine adjacent. Voici dans quelles circonstances.

À Tamié, avec la bénédiction divine, j’avais fini par former une belle communauté. Parmi ses membres il y avait un groupe de jeunes moines très ardents et très doués. S’étant rendu compte par l’étude, la réflexion et l’expérience, des déficiences de la Trappe, ces jeunes gens avaient résolu, le temps de leur engagement expiré, ils n’avaient que des vœux temporaires, de quitter l’Ordre et de fonder quelque part un monastère où ils s’efforceraient de mener la vie cistercienne authentique avec l’espérance d’en voir sortir un jour des moines qui s’en iraient en pays de missions pour y implanter la vie monastique.

Ils me demandèrent de les aider dans leur dessein. La chose était périlleuse car, indubitablement, les supérieurs majeurs  l’apprendraient avec indignation et réagiraient en conséquence.

Avant de rien faire, je consultai donc des personnes autorisées, des évêques, entre autres Mgr. De Guébriant alors Supérieur des missions étrangères, des supérieurs religieux, je profitai même d’un séjour que j’eus à faire à Rome pour y entretenir des personnes bien placées et prendre le sentiment du Cardinal Lépicier pour lors préfet de la congrégation des religieux. Tous furent unanimes pour dire que mes jeunes moines étaient dans leur droit et que je me devais de favoriser leur dessein. Le cardinal Lépicier m’en fit même une obligation en me faisant remarquer combien leur projet  répondait au désir du pape qui venait de publier l’Encyclique où il exhortait les moines contemplatifs à fonder en pays de missions.

Revenu en France, je cherchai donc un lieu où pourraient ses fixer mes jeunes gens en quittant Tamié. Je fus amené à choisir Boquen dans la persuasion qu’en Bretagne il y aurait des vocations ; j’ajouterai que la beauté des ruines ne fut pas sans influer sur mon choix.

Il est à noter qu’il n’était pas question pour moi de quitter Tamié avec ceux qui devaient faire la fondation, ils avaient parmi eux les éléments capables de tout mener à bien. Il est à noter aussi que Boquen ne fut pas acquis avec des fonds appartenant à Tamié, les fonds furent fournis par des amis qui les avaient mis à ma disposition.

Ici, comme en tant d’autres circonstances, la providence sembla se complaire à déjouer toutes les prévisions humaines. Une mort impitoyable enleva successivement en pleine jeunesse les deux futurs chefs de groupe. Mon expulsion de Tamié m’obligea à prendre personnellement le soin de la fondation à laquelle un seul des moines qui s’y étaient destinés put prendre part, les autres ayant été retenus à Tamié et empêchés de suivre celui qu’on leur dépeignait comme un schismatique, illuminé, rebelle et voleur, termes employés en plein Chapître de Sept-Fons par l’abbé Dom Marie.

Le principal, le seul grief allégué contre moi pour me déposer de ma charge, fut précisément l’appui apporté à ce groupe de jeunes religieux de Tamié. Je fus accusé d’avoir voulu sans permission, fonder un monastère de l’Ordre, ce qui était parfaitement faux. Il ne s’agissait aucunement de fonder un monastère de l’Ordre, les fondateurs libres de tout engagement vis-à-vis de l’Ordre, leurs vœux temporaires étant expirés, entendaient bien ne plus se lier à l’Ordre, convaincus qu’ils étaient qu’il s’opposerait toujours à la réalisation de leur dessein. Ils voulaient que leur fondation restât libre et indépendante sous la juridiction de l’ordinaire du lieu. 

DSC09432

 

 Naturellement en venant à Boquen, j’avais l’entier agrément de Mgr. Serrand. L’évêque de St Brieuc me connaissait bien, il était venu à Tamié ; il avait comme tous ses collègues de l’Épiscopat français, reçu la notification dont mention a été faite plus haut, mais comme il l’écrivait à Mgr. de La Villerabelle évêque d’Annecy, il savait à quoi s’en tenir en toute cette affaire, et l’abbé de Timadeuc étant venu demander que je ne sois pas reçu dans le diocèse, avait été éconduit. De sorte que, quand je me présentai à l’évêché, je fus accueilli à bras ouverts, avec la plus extême cordialité. À ma question : « quels pouvoirs me donnez-vous, Excellence ?“

_ Tous ceux que je puis vous donner, et au-delà !

Telle fut sa réponse.

À suivre…

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Dom Alexis, le chant des pierres
  • Sept témoins racontent le Père Alexis, arrivé en 1936 à l'abbaye de Boquen pour reconstruire le monastère et y fonder une communauté aux règles de vie quasi moyenâgeuses. Regards sur le tournage du film réalisé par François Gorin et Bruno Vienne.
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