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Dom Alexis, le chant des pierres
6 mai 2013

QUATRIÈME VOLET DU RAPPORT DE DOM ALEXIS

 

Notons en passant, une incidence digne d’attention.

À plusieurs reprises, des amis ont voulu former des groupements pour procurer à Boquen des ressources.

La première fois que fut émise cette idée, elle me déplut, mais je voulus avoir la pensée de Mgr. Serrand. Il me répondit “S’il s’agissait d’une autre œuvre, ce serait tout à fait normal, c’est le procédé accoutumé, mais s’agissant de Boquen, je dirai non. La providence s’est réservé de pourvoir elle-même aux besoins, à sa manière, il ne faut pas la contrarier en recourant à des moyens purement humains“.

En réalité, nous n’avons jamais eu de véritables difficultés sur le plan matériel. Les difficultés, et il n’en manqua pas, devaient venir d’ailleurs.

Difficultés extérieures d’abord.

En 1937 arrivait le huitième centenaire de la fondation de Boquen. On avait pensé commémorer l’événement par une petite fête, en compagnie de quelques amis. Nous fûmes dépassés par les circonstances. Le jour venu, le val fut envahi par une foule évaluée à plusieurs milliers de personnes. Une centaine de prêtres, les évêques de Chartres et d’Annecy, l’ancien archevêque de Rouen, Mgr. de La Villerabelle qui fit le sermon à la grand’messe chantée dans les ruines de l’église. Ce fut un succès absolument imprévu. Tout se passa très bien et sans aucun incident.

Pourtant, il n’y avait pas de route carrossable à l’époque pour accéder à l’abbaye et ce ne fut pas une petite affaire de ménager le départ de nombreuses voitures entassées dans les petits chemins et dans les champs. Nous étions tout à la joie de cette réussite qui prouvait que la fondation avait la faveur publique ; cette joie fut de courte durée.

Peu après, Mgr. Serrand qui, malade, n’avait pu présider la cérémonie et s’était fait représenter par son vicaire général, alors Mgr. Le Bellec, arrivait à Boquen porteur d’un document venu de Rome.

La Sacrée Congrégation des religieux demandait des explications au sujet de la fête de Boquen. L’abbé général des trappistes, en effet, alerté par un compte-rendu paru dans la Croix, avait porté plainte à la Sacrée Congrégation. Mgr. Serrand transmis sa réponse. De leur côté, les évêques d’Annecy et de Chartres réagirent vivement contre les assertions de l’abbé général des trappistes qui avait eu l’outrecuidance de mal qualifier leur présence à la fête.

Mgr. Serrand s’étant rendu à Rome à la fin de l’année, vit le cardinal La Puma, préfet des religieux et lui parla de moi. “Vous le prenez, vous vous en chargez ?“

_“ Mais oui, Éminence !“

_“Eh bien, je vous l’abandonne !“

Il le faisait avec d’autant plus de plaisir, qu’il avait été informé du fait que Mgr. Louis Canet, alors directeur des affaires ecclésiastiques, alerté à mon insu, par un ami de Paris, avait signifié au Nonce que le gouvernement ne tolérerait pas que la curie nous suscitât de nouveaux ennuis.

Nous eûmes donc la paix. Paix relative, il est vrai, car de tous côtés, il nous revenait que, dans les monastères de la Trappe, on ne se faisait pas faute de décrier Boquen et surtout son chef.

Nous venions d’être érigés en institut diocésain, en 1947, dans les formes régulières, par Mgr. Serrand, ce qui nous donnait la situation canonique qui nous avait manqué jusque-là, lorsque parut un roman intitulé “les illuminés“. L’auteur, un Hongrois réfugié en France, prétendait y relater, dans une forme romanesque, les origines et les débuts de Boquen.

Grand émoi chez les trappistes, dont le rôle n’était pas dépeint sous des couleurs très flatteuses. On m’accusa d’avoir composé et publié, ou, au moins, d’avoir fait composer et publier le livre.

En réalité, j’étais entièrement étranger à sa composition, que j’avais ignorée, et si j’avais eu vent de sa publication, je n’étais pas en mesure de l’empêcher.

La réaction des trappistes fut violente. Un émissaire qualifié se rendit à Rome à la Sacrée Congrégation des religieux, et réclama impérieusement la suppression immédiate de Boquen et la punition de son Supérieur. 

Cette démarche démesurée eut un résultat tout contraire à celui qu’elle se proposait. La Sacrée Congrégation voulut tirer au clair toute cette affaire de Boquen. Une visite apostolique fut décidée et, en juillet 1950, le vicaire général des cisterciens de la Commune Observance arrivait à Boquen en compagnie de deux autres abbés de l’Ordre.

Ayant pris connaissance du rapport du visiteur qui avait rencontré Mgr. Coupel, la SC. Notifia au vicaire général susdit : “Incorporez à votre Ordre cette communauté de Boque, autrement on ne lui laissera jamais la paix“.

Aussi bien, le chapître général réuni peu après, décida cette incorporation.

Le 15 décembre suivant, un rescrit de la SC. Restaurait l’abbaye de Boquen, la remettant en possession de tous ses droits et privilèges tels qu’ils étaient avant sa suppression.

Le 2 février 1951, un acte du Supérieur général des cisterciens, me nommait abbé de Boquen en me conférant toutes les prérogatives dont jouissent les abbés de l’Ordre.

Nous étions donc ainsi intégrés à l’Ordre cistercien ; il faut le dire, un peu à notre corps défendant, nous ne l’avions pas désiré et aurions plutôt préféré rester institut de droit diocésain.

Nous acceptâmes pourtant cette solution avec joie, comme ménagée par la bonne providence, laquelle montra encore sa sollicitude spéciale pour nous en cette circonstance car, depuis, nous avons eu la paix de ce côté et nos relations avec nos confrères de la stricte Observance sont devenues des plus cordiales, surtout depuis l’avènement du regretté D.Gabriel Sortais. À suivre…

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Dom Alexis, le chant des pierres
  • Sept témoins racontent le Père Alexis, arrivé en 1936 à l'abbaye de Boquen pour reconstruire le monastère et y fonder une communauté aux règles de vie quasi moyenâgeuses. Regards sur le tournage du film réalisé par François Gorin et Bruno Vienne.
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